Edito

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Depuis la rentrée, j’ai cessé d’écouter les radios d’info. Et puis j’évite aussi les sites des grands quotidiens. Ça fait belle lurette que je n’ai plus la télé. Il y a un moment où l’actualité ressemble à une telenovelas : ça n’avance pas et on ne sait pas trop où les gens qui produisent le truc veulent en venir – si ce n’est qu’ils cherchent visiblement à nous prendre la tête.

J’ai bien vu passer deux ou trois trucs, j’ai cru comprendre qu’à l’avenir, la RTBF miserait encore plus sur Benjamin Maréchal, que Bernard Westphaël passait en jugement, que ça n’allait plus du tout entre Brad Pitt et Angelina Jolie. Puis je suppose que Bart De Wever ou un de ses acolytes a dû lâcher une horreur ou l’autre et que des éditorialistes ont commenté tout ça dans des éditos empreints d’indignation. J’ai pas l’impression d’avoir raté grand chose…

Seulement là, au moment d’écrire cet édito, je me demande si ça n’aurait pas été plus simple de continuer à laisser les radios du service public me prendre la tête tous les matins dès 7h. C’est toujours plus simple d’avoir un truc contre lequel râler ! Ça donne un texte vite torché à partir d’une poignée d’arguments ruminés dans sa cuisine. Mais bon, voilà. Là, j’ai rien sous le coude pour une petite envolée de dernière minute (ouais, l’édito s’écrit toujours en dernière minute…)

Alors je ne sais pas… Je pourrais vous parler disons de… de Vernon Subutex de Virginie Despentes que j’ai lu en vacances. Ça pourrait largement faire l’affaire. D’ailleurs, c’est un peu marrant, le rapport qu’on entretient avec les livres pendant les congés d’été, c’est quasi l’inverse de celui qu’on a avec les émissions d’info. On veut qu’ils ne nous prennent pas la tête et qu’ils nous fassent respirer, qu’ils nous nourrissent au lieu de nous bouffer. Enfin soit, j’ai lu ce bouquin et je me suis dit : « Mais l’histoire de ce gars, on dirait un peu une sorte d’allégorie stratégique pour l’éducation permanente » (oui, C4 est une revue subventionnée par l’éducation permanente).

L’éducation permanente devrait franchement s’inspirer du parcours de Vernon Subutex. Ce gars était vendeur de disques et son magasin a fait faillite pour cause de mutations technologiques et de changements des habitudes de consommation. Il finit par se retrouver à la rue. L’éducation permanente, c’est un peu pareil : son core business, c’est l’émancipation des classes populaires. C’est tout aussi technologiquement dépassé que les disques vinyles – qui eux au moins conservent encore un marché de niche très important. Puis, le héros de Despentes est resté pote avec une rock star qui va mourir d’overdose. Là aussi, si on veut, il y a un point commun : la ministre de l’éducation permanente a aussi la compétence de la culture. Elle est en quelque sorte un peu l’amie des festivals d’été, de The Voice ou de Alice On The Roof. Mais tout ça est encore bien vivant, c’est vrai, c’est différent…

Après, Vernon Subutex va commencer à fonctionner comme une sorte de routeur grâce auquel se construit tout un réseau. Je crois qu’il ne pense plus grand chose ; en tout cas, la plupart du temps, il ne dit rien. Il n’est que le prétexte pour découvrir la vie d’autres personnages, celui qui rend possible la mise en lien de tous les protagonistes de l’histoire. Le seul contenu qu’il amène, c’est quand il mixe – et là, tout le monde trouve ça magique. Tout ça se finit dans une sorte de joie communautaire un peu mystique. Alors ça, évidemment, c’est très différent de la réalité actuelle de l’éducation permanente, mais c’est justement en cela que le roman de Despentes peut avoir un côté inspirant pour celles et ceux qui bossent dans ce secteur. Si Subutex permet la construction d’un réseau, pourquoi pas eux ?

Voilà, j’aurais aussi pu vous parler d’un texte de Valerio Evangelisti que j’ai lu juste après, et qui m’a fait penser aussi à l’éducation permanente.C’est une grande saga qui raconte les luttes ouvrières et paysannes d’une région du nord de l’Italie. On y voit comment elles ont permis la création des partis, des syndicats, des bourses du travail, des coopératives. Et puis on assiste à la destruction quasi complète de tout ça par les fascistes, soutenus par les patrons et les propriétaires terriens.

Mais bon, j’ai plus le temps et, de toute façon, le bouquin n’a pas été traduit en français… [Lire en PDF]

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