Comme son nom l’indique, le terme hooligan provient d’Angleterre. Si ses origines exactes restent floues, la signification qu’il va rapidement endosser, à la fin du XIXe siècle est sans équivoque : ça veut dire « voyou », « dur », « brute », « canaille ». Dans un premier temps, le mot n’est pas lié au football, les premières occurrences du terme en rapport avec le sport concernent, en Angleterre, le cricket et, en France, on le voit d’abord accolé au cyclisme. On est à l’époque autour des années 1900.
Durant les années 60, le hooliganisme s’implante de manière significative dans les tribunes des clubs de football anglais et aux abords des stades. Le phénomène se développe pendant toutes les années 70 et gagne finalement le continent où les premiers groupes de hooligans se forment, s’inspirant directement de ce qu’ils voient les supporters de West Ham, de Chelsea, de Tottenham ou encore d’Aston Villa faire lorsqu’ils débarquent dans des villes européennes à l’occasion des matchs internationaux.
Les hooligans sont bientôt définitivement liés au monde du football. Leur pratique consiste à rechercher systématiquement la confrontation physique, que ce soit avec des groupes rivaux (aussi appelés « side » en Belgique) ou avec la police. La violence est, en quelque sorte, au centre de leurs agissements. De ce point de vue, notamment, les hooligans empruntent beaucoup aux subcultures qui émergent au sein de la jeunesse issue des classes populaires urbanisées en Angleterre, à partir de la fin des années 50. Les « teddy boys », puis les « mods », les skinheads et le punk ensuite, laissent tous, d’une manière ou d’une autre, de la place à la baston dans leur grammaire comportementale.
Le drame du Heysel va faire des hooligans la parfaite incarnation du barbare des sociétés occidentales de la fin du second millénaire. Le 29 mai 1985, la finale de la coupe des club champions, le sommet du foot européen, oppose à Bruxelles, la Juventus de Turin au Liverpool FC. Une tentative de « prise de tribune » des hooligans anglais provoque un mouvement de panique parmi le public du bloc Z où ont pris place des juventini de Belgique quand la théorie l’avait réservée à un public neutre. La police est débordée, un mur vétuste cède. 39 personnes perdent la vie, 454 sont blessées.
En Angleterre, la répression frappe les clubs anglais (suspendus de compétitions européennes jusqu’en 1991) mais aussi les hooligans. Margareth Tatcher, alors au pouvoir en Grande-Bretagne, rêve de « crucifier tous les skinheads », plus rien ne l’empêche désormais de frapper fort. La dame de fer déploye un arsenal législatif très dur, culminant avec le « Football Spectator Bill » de 1989 qui consiste à ficher l’ensemble des supporters de foot avec une carte individuelle (comme s’ils étaient tous des coupables potentiels). Les caméras font également leur entrée dans le stade, pour regarder uniquement vers les tribunes.
Est-ce un effet secondaire non désiré de ces mesures musclées ? Toujours est-il que les stades anglais vont sortir profondément bouleversés de ces années de « nettoyage au kärcher » : on y trouve bientôt un public comme il faut, occupant des places uniquement assises (et n’essayez pas de vous lever sauf si le speaker vous invite à une « standing ovation » ou à faire « la ola »). Bientôt, la transformation du championnat anglais en Première League vient parfaire la mutation, l’ère du foot business est définitivement ouverte.
Aujourd’hui, le centre de gravité du hooliganisme semble s’être déplacé vers l’est (Pologne, Russie, Serbie…). Il se transforme, aussi. On assiste à l’émergence des « free fight », les confrontations entre groupes adverses ont lieu en toute discrétion, dans les bois, sur rendez-vous et de manière relativement régulée.