On vous avait prévenu, ça ressemble à un chantier : la disparition de la presse « de gauche » laisse un gros trou qu’aucune expérience alternative ne parvient à combler – notamment faute de structures financières innovantes. Dans le secteur public comme dans le privé, les mots d’ordre sont « synergie » et « convergence », et appartiennent sans doute davantage au langage du management qu’à celui de la stratégie éditoriale. Il en résulte un paysage médiatique marqué par une forte concentration de propriété et de pouvoir nocive pour le pluralisme et la diversité dans un écosystème francophone belge si petit, à l’heure où les logiques sont mondialisées.
Les structures de financement public, sensées participer à une régulation du secteur, semblent ne pas avoir pris toute la mesure des bouleversements qui touchent le secteur de la production de l’information en ce début de troisième millénaire. Elles apparaissent parfois comme obsolètes, notamment quand elles perçoivent les médias émergents comme la simple déclinaison numérique d’institutions déjà existantes – Le Soir en ligne, RTBF.be…
Or, s’il existe un espoir de re-nourrir l’écosystème médiatique local, bien mal en point, il se trouve dans l’innovation radicale et non dans le maintien d’énormes colosses aux pieds d’argile (parmi lesquels on trouve d’ailleurs des groupes privés avançant des logiques marchandes pour restructurer leur rédaction, tout en contribuant à façonner l’opinion publique à leur manière). L’innovation, elle est dans la tête des pigistes, alors arrêtons de financer, sans se poser la moindre question, ces grosses machines qui peinent visiblement à se renouveler. Enfin, si on veut remettre du pluralisme et de la diversité dans le paysage médiatique de la FWB.
D’autant qu’en vous présentant les choses de la sorte, on s’appuie sur une définition relativement classique des termes « médias » et « information ». Il nous faudrait encore intégrer au problème les grands géants du web, en passe de s’imposer comme les principaux médias à l’échelle mondiale. Mais, bon, comme dirait le sage sur le sommet de la montagne : un pied devant l’autre…