Café ou frite… la chaleur de la solidarité made in Liège

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Le caffè sospeso, une tradition qui est apparue dans les cafés napolitains, commence à faire son chemin en Belgique. La démarche est assez simple: on consomme un café et on en paie deux. Et ce n’est pas de l’arnaque! Il s’agit de laisser un café payé pour un client démuni qui ne pourrait pas se l’offrir. Cette démarche solidaire s’est adaptée aux traditions liégeoises car, si à Naples le café est un « droit inaliénable », les frites, elles, le sont à Liège.

cafe_susIl y a quelques mois, Pierre, le gérant de la Toccata, fameux café de la Place du Marché à Liège, lançait le caffè sospeso ou « café suspendu » en français, suite à une conversation avec une de ses habituées : « elle me racontait qu’en voyage en Italie, elle avait vu cette tradition napolitaine, les gens prenaient un café pour eux et laissaient un café payé pour un passant qui en aurait besoin. L’idée m’a semblé formidable et on a essayé de faire la même chose ici ». La mise en place de cette démarche fut assez simple. À la Toccata ils ont opté pour un tableau où sont marqués les cafés suspendus de la journée. De son côté, le client précise lors de sa commande le nombre de cafés suspendus qu’il souhaite payer, puis son nom et le nombre de cafés y sont inscrits. Cependant, le client a deux options pour choisir le destinataire : « il peut garder le ticket où est indiqué le nombre de cafés suspendus et donner ce ticket à la personne lui-même. Ou il peut laisser le ticket au café et ce sont les serveurs qui prennent soin de le donner à un des demandeurs », précise Pierre. Sa politique est d’en faire bénéficier le plus grand nombre possible : « on filtre les personnes qui viennent demander un café suspendu. On a eu une personne qui venait le matin, l’après-midi et le soir, et on a dû parler avec lui pour qu’il comprenne que la démarche devait toucher plus de personnes » affirme le gérant de la Toccata. Il y a bien sûr des personnes qui essaient de profiter de la solidarité des autres mais les serveurs veillent afin d’éviter les abus. « Une fois, une personne s’est fait passer pour un chômeur afin de prendre un café “gratuit”, peu après je l’ai rencontrée au Primark. Il travaillait là-bas ! Il était si gêné qu’il est repassé pour laisser cinq cafés suspendus », raconte Pierre en souriant.
Alors que le café suspendu peut donner un peu de chaleur aux mendiants lors des froides journées liégeoises, la frite suspendue se présente aussi comme une très bonne alternative pour remplir leurs estomacs bien souvent vides. Laurent Halleux, propriétaire de La Frite, rue de la Cité 5 à Liège, avait beaucoup entendu parler de la tradition napolitaine du caffè sospeso. Il a ainsi voulu ramener le concept à quelque chose de très liégeois : la frite ! « On voulait le faire ici et on s’est dit que c’était possible avec la frite puisque ce n’est pas très cher, seulement un euro, et en plus il s’agit d’un petit repas. Dans notre cas, le client paie les frites et nous payons la sauce, nous voulions apporter quelque chose aussi ». Comme pour le café suspendu, la frite suspendue a eu un très bon accueil auprès des clients : « dès le lancement on a eu beaucoup de clients qui laissaient des frites suspendues, maintenant de moins en moins ». Du côté des bénéficiaires, la démarche a été elle aussi très bien accueillie. « Au début ils étaient très surpris, pour eux c’est très chouette. On a des habitués ou des voisins qui passent souvent pour en demander », confirme Laurent. De nos jours, il est de plus en plus rare que les gens donnent de l’argent aux mendiants dans la rue et de plus en plus souvent certains mendiants demandent aux gens de
leur payer un sandwich ou un café. La frite et le café suspendus sont une belle alternative pour les aider et éviter la méfiance de certains quant au bon usage des sous qu’ils pourraient donner, s’imaginant qu’ils serviront plutôt à acheter de l’alcool ou de la drogue plutôt que de la nourriture. Mais les critiques ne sont jamais loin quand ce type de démarche s’installe. Les promoteurs de cette idée se font souvent accuser de faire de la « pub » gratuite via les médias qui relayent l’initiative. « On fait ça pour aider les gens, ce n’est qu’un tout petit truc mais ça peut aider certains à s’en sortir et on souhaite que ça continue », se défend Laurent. « Des choses comme ça donnent un air sympa et agréable aux Liégeois » conclut-il.

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