En 2012, le chômage fait peau neuve…

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Suite aux accords du Gouvernement Di Rupo, une nouvelle législation en matière d’assurance chômage entre en vigueur à partir du 1er janvier 2012. Cette réforme, qui devrait permettre « la modernisation » du système actuel modifiera le régime sur trois points : les allocations d’attente (obtenues sur base des études), la dégressivité des allocations obtenues sur base d’un travail, et la notion d’emploi convenable.

Les allocations d’attente

Avant 2012, un chômeur sortant directement des études devait patienter un certain nombre de mois avant de pouvoir bénéficier d’allocations, dites « d’attente ». La durée de ce « stage d’attente » variait en fonction de l’âge du « jeune » : neuf mois s’il avait moins de 25 ans au moment de la demande, un an s’il avait plus de 25 ans au moment de la demande. Passé ce délai, les personnes bénéficiaient d’allocations — dites d’attente — qu’elles percevaient jusqu’à ce qu’elles trouvent un emploi, sans limitation dans le temps (mais sous le coup malgré tout des contrôles inhérents au plan d’activation, lesquels peuvent déboucher sur des sanctions et exclusions) .

Désormais, avec la nouvelle législation, c’est terminé. Tout commence avec un important changement d’appellation et une uniformisation de la durée: le « stage d’attente » s’appellera désormais «stage d’insertion professionnelle» et il durera un an pour tout le monde. Il ne s’agira certes pas de « patienter » durant cette année : les « jeunes » candidats devront prouver qu’ils recherchent activement un emploi. Pour ce faire, ils devront se présenter trois fois durant leur période de stage auprès des services chargés du suivi des demandeurs d’emploi. Il faudra qu’au cours de chacun de ces trois rendez-vous, les « aspirants chômeurs » obtiennent une note positive pour accéder aux allocations – qui, dans ce cas, seront toujours dites « d’attente ». Dans le cas contraire, le délai d’attente sera prolongé de six mois minimum et ils devront nécessairement cumuler trois notes positives pour ouvrir leur droit aux allocations d’attente. Une fois ce droit ouvert, le jeune devra prouver régulièrement qu’il cherche activement un emploi. En cas d’une seule évaluation négative, le jeune perdra son allocation pour une durée de six mois et il ne pourra la récupérer qu’en cas d’évaluation positive.

Ces « allocations d’attente » subissent elles aussi d’importantes modifications. Tout d’abord, elles seront désormais limitées à trois ans pour les coha-bitants dont le conjoint travaille ainsi que pour les chômeurs de plus de trente ans. Il faudra prouver 156 jours de travail sur une période de deux ans pour prolonger le droit. Dans le cas des cohabitants dont le conjoint travaille, la mesure prend effet au 1er jan-vier 2012, avec application dès avril. La FGTB a annoncé que 24.000 chômeurs sont concernés. Pour les chômeurs de plus de trente ans, la période antérieure au 1er janvier 2012 ne sera pas prise en compte. Les sanctions effectives débuteraient donc au 1er janvier 2015 et concerneraient 110.000 chômeurs.

La dégressivité des allocations de chômage

Alors que les allocations d’attente sont versées aux jeunes arrivant sur le marché du travail, les allocations de chômage concernent les personnes ayant déjà travaillé (il faut prouver minimum 312 jours sur 18 mois) et qui ont perdu leur emploi.

Les allocations de chômage feront également l’objet d’importantes modifications en termes de montants. A partir du 1er janvier, la dégressivité de ces montants dans le temps sera accrue.

La première période aura une durée d’un an

Durant les trois premiers mois, le chômeur touchera une allocation égale à 65% de son dernier salaire brut. Cependant, ce salaire brut sera plafonné à 2324 euros. Les 3 mois suivant, ses allocations seront égales à 60% du dernier salaire brut, toujours plafonné au même montant. Enfin, durant les six derniers mois de la première période, le chômeur touchera toujours un montant égal à 60% du dernier salaire brut,
mais le plafond sera abaissé à 2166 euros.

La seconde période est beaucoup plus complexe

Celle-ci devrait durer deux mois minimum – avec la possibilité d’y ajouter deux mois supplémentaires «par année de carrière ». Par exemple, si le chômeur a travaillé 2 ans, il aura droit à quatre mois supplémentaires d’allocations dans ce régime. Cette période sera divisée en deux sous-périodes : une première de douze mois maximum et une autre de vingt-quatre mois maximum. Durant la seconde sous-période, les allocations seront dégressives et diminueront tous les trois mois jusqu’à atteindre le montant forfaitaire de la troisième période. Cependant, aucune échelle n’a encore été prévue pour la dégressivité, ce qui signifie qu’il est actuellement impossible de dire la vitesse à laquelle diminueront les allocations.

Dans ce cas-ci, des dispositions ont été prises concernant les personnes bénéficiant déjà d’allocations de chômage avant le 1er janvier 2012. A partir du 1er juillet 2012, ces personnes passeront dans l’une de ces deux sous-périodes en fonction de leur situation. Les cohabitants avec charge de famille touchant des allocations depuis plus de douze mois passeront dans la première sous-période. Les isolés avec plus de vingt-quatre mois de chômage intègreront la seconde sous-période. Les cohabitants sans charge de famille qui ont plus de douze mois de chômage verront le montant de leurs allocations calculées en fonction des dispositions prises pour l’ensemble de la seconde période. Cela signifie que le montant qu’ils toucheront dépendra de leur durée de travail et de chômage.

Enfin, la troisième et dernière période prévoit le versement d’un montant forfaitaire tel qu’il existe déjà actuellement : 1069,38 euros pour un chef de famille ; 898,30 euros pour un isolé et 474,50 euros pour un cohabitant. Aucune limitation dans le temps ne semble être prévue dans ce cas.

Cependant, tous les chômeurs ne sont pas visés par cette mesure. Les personnes ayant plus de vingt ans de carrière, les personnes âgées de plus de 55 ans, les chômeurs temporaires et à temps partiel ne rentrent pas dans la nouvelle législation.

Les notions d’emploi convenable et de disponibilité

Des modifications ont également eu lieu concernant la notion d’emploi convenable. Avant le 1er janvier 2012, un demandeur d’emploi pouvait refuser un emploi si celui-ci se situait à plus de 25 km de son domicile. Avec la nouvelle législation, la distance acceptable est portée à 65 km. Par exemple, un demandeur d’emploi habitant Liège ne pourra plus refuser un emploi situé à Namur car la distance entre les deux villes est de 65 km. De plus, avant 2012, un demandeur d’emploi depuis moins de six mois pouvait refuser un emploi s’il le jugeait non convenable. A partir de 2012, la période durant laquelle le demandeur pourra juger un emploi comme non convenable sera raccourcie et dépendra de sa durée de carrière. Ainsi, un jeune sortant des études avec un diplôme universitaire ne pourra pas refuser un emploi d’emballeur sous prétexte qu’il le jugerait non convenable…

Diverses modifications

L’obligation de disponibilité des demandeurs d’emploi était limitée à 50 ans avant 2012. Désormais, elle sera portée à 60 ans dès 2013, voire à 65 ans dans les régions connaissant un faible taux de chômage. Dans ce cas-ci, les Régions seront compétentes pour déterminer la disponibilité des demandeurs d’emploi. De plus, les prépensionnés seront mis en disponibilité, sauf ceux ayant exercé des métiers lourds ou ayant une dérogation.

En conclusion, les demandeurs d’emploi connaitront des mesures beaucoup plus contrai-gnantes à partir du 1er janvier 2012. Selon references.be, « L’idée générale est de combattre le chômage de longue durée et de «pousser» les personnes sans emploi à retrouver un job le plus rapidement possible tout en continuant à faire jouer la solidarité ». Mais, pour le moment, des zones d’ombres persistent : quels seront les montants exacts des allocations de chômage une fois la dégressivité enclenchée ? Comment vont s’organiser
les contrôles ? Quelles perspectives d’avenir pour les personnes exclues ?

Quoi qu’il en soit, l’inconnue la plus importante concerne les dispositions qui seront prises afin de relancer le marché de l’emploi. Rappelons que la Belgique est traversée par une crise de l’emploi depuis les années 1970 et qu’aucune relance véritable n’a été mise en oeuvre depuis. Les précédentes mesures « d’activation » des chômeurs n’ont jamais été un réel succès. Nos politiques essayent de faire porter la responsabilité du chômage aux seuls demandeurs d’emploi, dont on tente de nous faire croire qu’il ne veulent pas trouver de travail. Alors que les offres manquent résolument et qu’aucune disposition ne semble être prise pour la création d’emplois sérieux, il convient de se demander ce qu’il en sera lorsque l’ensemble de ces mesures sera d’application et que tomberont les premières têtes…

 

Jean-Michel Célant

 

Plus d’infos : http://1000milliards.collectifs.net/

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