Le concept même de galerie en tant que lieu — public et plus tard privé — d’exposition de vente d’œuvres d’art est finalement assez récent.
C’est une idée éminemment moderne, qui apparaît timidement à la charnière des 17ème et 18ème siècle et qui s’impose vraiment à partir du 19ème. Et il faut attendre la fin du 19ème et surtout le 20ème siècle pour que s’établisse un véritable marché de l’art.
Des temples…
Avant le 18ème siècle, il n’existait pas vraiment de lieux d’expos et
de vente d’œuvres d’art. Il y avait bien des privilégiés, des patriciens, des aristos puis des bourgeois qui commandaient et parfois collectionnaient des œuvres, mais la démarche était d’ordre privé. On comptait aussi des rois ou des seigneurs collectionneurs. Songeons notamment à la grande époque des mécènes, à la Renaissance.
En fait, la première institution qui exposa à travers les âges des tableaux et des sculptures à la vue des profanes, c’est l’Eglise. Et avant elle, les temples. D’ailleurs, jusqu’à la fin du Moyen-âge, l’art était presque exclusivement mystique ou religieux.
Après, il sera aussi historique, représentant les grands faits d’armes et les grands hommes. On commença d’ailleurs à exposer les œuvres dans des monuments pour magnifier tel ou tel pouvoir politique.
…aux Salons
Au 18ème et au 19ème, c’est la grande époque des salons, d’abord et surtout en France, en particulier à Paris. A l’origine, il y a l’exposition des académiciens dans le Grand Salon du Louvre. C’est de là que vient le nom générique de « salon », même quand ça se passera ailleurs…
En 1648, Mazarin crée l’Académie des Beaux-arts. On commence à exposer les meilleures œuvres au Grand Palais, puis au Grand salon du Louvre. Au 17ème, ses salons sont un peu irréguliers et réservés aux artistes. Puis, peu à peu, ils s’ouvrent au public le dimanche, à l’exception des femmes et des étrangers!
Avec la Révolution française et les premières volontés « d’éducation populaire aux arts », le phénomène se démocratise. Les salons se tiennent régulièrement et s’ouvrent aux non-académiciens. Ils connaissent de plus en plus de succès. On commence à éditer des livrets pour pouvoir acquérir des œuvres. Puis, le salon est utilisé à des fins politiques par la république, puis par Napoléon. Naissent des salons d’indépendants, puis le fameux « salon des refusés », car la demande des artistes souhaitant être exposés devient de plus en plus importante.
Les galeries du Louvre
Parallèlement, au Louvre, qui peu à peu deviendra le plus grand musée du monde, on ouvre des ailes du château, « des galeries », pour y exposer tel ou tel type d’œuvre d’époques définies. Le nom est resté.
Au 19ème et 20ème siècle, les Etats investissent dans la culture. C’est alors que naît la politique muséale, et que se développent les grandes galeries d’art moderne et contemporain à Londres ou à New-York. On voit émerger une nette volonté de la part des Etats de conserver et d’exposer à la vue du public le patrimoine artistique national, puis international.
Dans le même temps, avec le développement de l’économie de marché, d’une part, et la démocratisation de la culture, d’autre part, on débouche sur un véritable marché de l’art. De grandes collections et des collectionneurs célèbres apparaissent, ce qui donne parfois à son tour naissance à des musées (par exemple le fameux musée Guggenheim), ou font les beaux jours des premières grandes galeries marchandes privées.
L’explosion du marché de l’art
Fin 19ème, début 20ème, ce sont surtout des antiquaires, brocanteurs et autres amateurs d’arts qui se spécialisent dans le commerce d’œuvres d’art. Les véritables galeries spécialisées dans l’art contemporain ne se développeront réellement qu’après la seconde guerre mondiale, avec Paris, New-York et Londres comme épicentres.
Tout ça nous mène à l’explosion des galeries et du marché de l’art, qui bat des records dans les années 80-90. Les grandes entreprises, assurances et fonds
de pension investissent des millions dans l’art, qui est défiscalisable. Après les excès et une certaine dépression, le marché et les galeries ne se portent pas trop mal aujourd’hui, et certains tableaux modernes battent encore des records de prix.
Le troisième millénaire voit émerger de nouvelles tendances, comme celle des petites galeries hype mais abordables. Une autre tendance dans l’air du temps est celle qui consacre la galerie virtuelle, outil démocratique qui correspond bien à notre époque du marché globalisé et du village global, puisque les œuvres y sont dématérialisées (c’est parfois plus pratique, quand on voit la complexité de certaines installations) et déterritorialisées.