Un livre de Pascal Leclercq
aux Ed. Coups de Tête
Une tonalité dans les graves énaurmes
Alors même que nous n’en sommes qu’au début et que notre héros se retrouve coincé entre son pote Outchj et sa femme Damoutchj, dans le lit plus que conjugal, le récit se fixe directement sur les données essentielles de l’humain. « Sa bouche va prestement du goulot à la pâte trop cuite, avant de relâcher dans l’atmosphère de grands rots exprimant mieux que toute envolée discursive son bonheur d’être au monde ».
Voilà qui est bien dit ! Et cela même avant de se faire courser par une petite frappe de pédé à l’affût dans le bois local, tel le Grand méchant loup guettant son Chaperon rouge. Pourtant, Marzi n’est que rarement arboricole, sauf quand il doit, veut s’occuper des plantes de sa Dame sa mère. Celle-là, elle est aussi bien campée dans les coutures épaisses d’un personnage sans cœur : une vraie hyène pour la tendresse innée de Marzi J.
Le scénario ne s’embarrasse guère des vraisemblances habituellement convenues par le genre narratif quel qu’il soit. Ici, on narre tant qu’on peut et on le fait avec la palette des grands camions qui foutent la frousse en vous frôlant. J’ai trouvé délicieux quelques petits trucs comme la traduction systématique des lieux bruxellois en flamand : Marzi rejoint la Capitale (De Hoofdstad) avant d’aller à la Bourse (De Beurs) par le canal (het kanaal), etc. Quand on sait que le tout a été sullivannement traduit de l’italien, y’a pas à dire, ça fait soupe au pistou.
Rocambolement vôtre : au-delà du thriller
On l’a compris, tout a été savamment concocté pour assurer un maximum de plaisir au lecteur. Les épices ne sont pas rares et les débordements de casseroles non plus. Ainsi, les tribulations de Marzi l’amènent en Italie où il doit rejoindre le village qui porte son nom afin d’y entrer en contact avec ses aïeuls.
Il va donc croiser des mafieux, des ingénieurs qu’il tient par les couilles (je me demande bien qui, dans le réel, a inspiré le personnage de Germinal Prune, et celui qui s’y reconnaît et se manifeste auprès de l’asbl « D’une certaine gaité,…. » aura droit à un cadeau), des bas nylon troués, des troquets, des abeilles et des guêpes.
La conclusion de ce périple est forcément déceptive. Un peu comme Ulysse qui va gambader pendant une vingtaine d’années en butinant la Calypso, en vivant d’extraordinaires aventures, en volant sur le chant des sirènes, pour finir par retrouver sa moitié qui fait du tricot. Le pire : il doit la féliciter de sa patience et se dire que désormais il faudra faire avec ! Bon, ici, ce n’est pas sa bonne femme qu’il retrouve, mais c’est quand même par une sale blague du destin que ça se termine…