À cause de la violence de la première guerre mondiale, des armes utilisées et de son champ de bataille très peu mobile, il était extrêmement difficile de récupérer les corps et de les identifier. Il semblerait d’ailleurs qu’il était courant au sein de l’armée allemande de dépouiller les cadavres des signes distinctifs permettant de les nommer. La tombe du soldat inconnu permet aussi aux proches sans nouvelles des leurs d’avoir un endroit où se recueillir.
La Belgique mit deux ans de plus que les Français à se décider. C’est en 1922 qu’eut lieu la cérémonie de sélection du cadavre et l’enterrement en présence de la famille royale et de tout ce que la Belgique compte de patriotes. On demanda aux chefs des cinq zones où la guerre fit le plus de ravages de leur fournir la dépouille d’un poilu inconnu mort au combat. Une seule condition : être belge. La population de l’époque n’aurait pas supporté une erreur de casting. C’est ainsi que le 10 novembre, on déposa 5 cercueils en cercle dans la gare de Bruges. Le Général de Longueville donna l’ordre à Raymond Haesebrouck, un aveugle de guerre de Bruges, de procéder au tirage au sort. Toutes les précautions furent prises afin que le soldat inconnu le reste : les cercueils ne mentionnaient rien qui puisse faire deviner leur provenance et ils furent mélangés pendant les préparatifs du tirage au sort.
Cette tradition est fortement présente parmi les vainqueurs des différentes guerres depuis 1920. Le devoir de mémoire est une valeur très importante parmi les populations et les victimes. C’est ainsi qu’il est assez facile de trouver des archives concernant le mode de sélection, la cérémonie, les commanditaires et tout ce qui touche au(x) soldat(s)inconnu(s). Nous ne nous moquerons pas dans ces lignes de cet aspect très symbolique et émotionnel de l’usage guerrier. Il est cependant assez surprenant de remarquer le contraste entre l’anonymat total du soldat enterré et la publicité faite autour des commanditaires et exécutants, ainsi que des moindres détails des cérémonies et des lois ayant permis la création de ce monument.