Intervenant précisément à un moment de la vie où le culte de la performance et l’impératif de la prouesse sportive peuvent faire place à la qualité de la rencontre et à la richesse du plaisir partagé, dégagée par ailleurs des enjeux de la procréation et des soucis de la parentalité, la sexualité du troisième âge peut aussi apparaître bien plus épanouissante et plus libre. Faut-il y voir l’une des raisons qui la cantonnent encore au rang des tabous ? Un tabou qui pourrait s’effondrer bientôt au vu du vieillissement croissant de la population… Une population de seniors dont certain-es semblent bien décidé-e-s à continuer à jouir de la vie, y compris grâce au sexe.
La sexualité est souvent présentée comme un domaine réservé à la jeunesse avec tout ce que cela présuppose de force, de beauté et de santé. Certes, l’activité, y compris sexuelle, se réduit avec l’âge, mais le désir ne s’éteint pas. Aux environs de 50 ans, le processus de vieillissement, tant chez l’homme que chez la femme, se manifeste de manière plus perceptible. Un des mythes qui accompagnent cette période serait la disparition du désir. Or, si les changements hormonaux, la fatigue et les tensions interfèrent directement avec les relations sexuelles, ils ne signifient pas nécessairement une baisse de la libido.
Si l’activité sexuelle se réduit davantage chez les femmes que chez les hommes, il faut y chercher une cause démographique, car la mortalité est plus précoce chez les hommes. Dans la plupart des cas, les femmes se retrouvent veuves à un âge avancé, et, faute de partenaires disponibles, beaucoup de femmes s’abstiennent. Par ailleurs, la sexualité est mieux acceptée socialement chez l’homme que chez la femme à partir d’un certain âge.
Selon une enquête réalisée par « Test Achat » en 2007 sur la qualité de vie des personnes de 65 à 79 ans, il ressort que plus d’un quart des personnes interrogées restent actives sexuellement. De plus, dans les 5 plus gros sujets de préoccupation concernant leur qualité de vie figurent en tête leurs performances et désirs sexuels, avec 27-26% d’insatisfaction. Le Dr Paul, 66 ans, marié à Marie, 51ans, nous livre son témoignage en ces termes : »C’est très intéressant de traiter de la sexualité du 3ème âge car l’impuissance est très mal vécue par les hommes. Certains pensent même au suicide. Pour ma part, je reste modérément actif sur le plan sexuel. La cadence n’a pas encore baissé, je peux faire l’amour tous les deux jours ».
Mais que pense la société de l’épanouissement global, y compris sexuel, des personnes âgées?La tradition judéo-chrétienne qui sous-tend la culture occidentale accepte la sexualité dans le but de procréer, et pas pour procurer du plaisir. Bon nombre de personnes ne conçoivent d’ailleurs pas que leurs parents continuent à éprouver du désir sexuel. Après avoir été longtemps considérée comme un sujet tabou, la sexologie des personnes âgées est traitée aujourd’hui essentiellement du point de vue clinique.
A côté de cela, le rôle de grands-parents n’est plus réduit à s’occuper des petits-enfants. De plus en plus de personnes au-delà de 60 ans divorcent et font de nouvelles rencontres. Joséphine, enseignante à la retraite, nous a déclaré avoir décidé de divorcer après que les enfants ont quitté la maison. A 60 ans, elle a rencontré Jacques, 63 ans, qu’elle aime tendrement. Cependant, certains préjugés ont la vie longue. « Peut-on bander sans rougir quand on est vieux »? s’interroge André, 75 ans, ouvrier. » Je me sens attiré par des femmes plus jeunes en mini-jupes », lance-t-il. Marie, aide-soignante, nous déclare, souriante, que l’amour illumine la vie à tout âge. Elle parle de Bernadette, une pensionnaire de 80 ans, acariâtre, qui s’est transformée après avoir rencontré Jean, 83 ans. « Elle est devenue gentille et câline », dit-elle. Peut-on un jour espérer que des maisons de repos se transforment en résidences « all inclusive »? Ainsi, les pensionnaires pourraient-ils avoir droit aux services d’accompagnateurs
sexuels, comme cela se pratique en Allemagne, au Danemark ou au Pays-Bas?Un accompagnateur sexuel est un intervenant formé et payé pour aider à donner du plaisir sexuel à une personne malade ou invalide qui en a besoin. Pourrait-on alors demander un service à la carte de « masseuses spécialisées » ou « dames de compagnie » sans choquer?