Quand les quartiers se tissent

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Pour en parler, nous avons rencontré Julie Lange, chef de projet du plan de cohésion sociale de la commune d’Esneux.

« C’est tout nouveau. Avant, dans les communes, il y avait les plans de prévention, puis les plans de prévention-proximité. L’objectif principal du plan de cohésion sociale, c’est la création du lien social dans les communes et de veiller à ce que chaque individu, quelle que soit son origine sociale, ethnique ou philosophique ait accès à tous les droits fondamentaux. » Le plan comporte 4 axes : l’accès au travail via la réinsertion professionnelle, l’accès au logement, aux soins de santé et au traitement des assuétudes, et la mise en place de tout ce qui participe au‘tissage du lien social‘. Dans le cadre du projet « D’une rive à l’autre », la commune « a eu envie de valoriser le domaine, de montrer à l’extérieur qu’en dépit du délabrement d’une partie du domaine et de la misère sociale, il y a des choses positives qui s’y passent. On a aidé les personnes qui désiraient s’associer en comité de quartier à se structurer. »

Partir des forces déjà en place

« Le travail consiste à regrouper les différents acteurs de ces axes autour d’une même action par la mise en place de partenariats. » poursuit Julie Lange. Récemment, la commune a posé un diagnostic des actions qui ont bien fonctionné auprès des comités de quartier et du public : « On peut citer la concertation des comités de quartier, la prévention de la violence contre les personnes âgées, une compétition de rollers et BMX pour les jeunes,… On travaille avec toutes les branches de la population dans le but de les mettre en lien, de provoquer des rencontres. » Pour Julie Lange, l’intérêt du plan de cohésion sociale est d’aller chercher les forces là où elles sont, dans les comités de quartier par exemple. « Il y a plein d’actions au sein de chaque quartier. Des personnes se sont regroupées spontanément pour faire des choses, renforcer les solidarités, développer la convivialité. On s’est rendu compte que chacun travaillait dans son coin, proposant des activités de qualité mais un peu à la débrouille. Alors, on a pensé qu’il fallait mettre toutes ces personnes ensemble, leur permettre de se rencontrer, de partager leur expérience et aussi leurs compétences. Par exemple, le chapiteau que le comité de Fontin vient d’acquérir peut être prêté à un autre comité en fonction de ses besoins. On a structuré ce qui existait déjà. Le but du plan de cohésion n’est pas de réinventer la poudre, mais de sublimer et d’articuler les forces déjà en place. »

Des projets collectifs

Avant d’occuper sa fonction de coordinatrice, Julie Lange, comme sans doute beaucoup de citadins, avait une vision plutôt touristique de la ville d’Esneux : « là où on va manger des glaces… » Très vite, elle a été mise en contact avec les éducateurs de rue puis les acteurs sociaux, et a tout de suite été portée par l’implication des habitants et leur vœu de solidarité : « On part de ce que les gens ont à offrir, de leurs envies. On est juste là pour catalyser leur énergie. Dans notre société, où on a souvent l’impression que les motivations sont mornes et éteintes, c’est une vraie force de se rendre compte que plein de gens bougent. » Le plan de cohésion aide des projets de comités à se concrétiser : « Il y avait deux projets de bibliothèque de quartier et de potager communautaire. On s’est informés pour savoir ce qu’il était possible de faire. Les comités se réunissent une fois par mois depuis un an et nous les rencontrons individuellement à leur demande. Chaque comité développe des projets qui correspondent à la réalité sociale de leur quartier : certains vont organiser des brocantes, d’autres des balades en forêt, une Saint-Nicolas pour les enfants, des projets d’entraide,… »

La commune d’Esneux vient de lancer la campagne « Ça bouge dans mon quartier » qui a la particularité de présenter sur une même affiche tous les comités et leurs activités,
une manière de toucher un plus large public. Le bâtiment communal de l’Escale est un lieu de rencontre et d’information pour les habitants de la commune. Les bureaux du plan de cohésion sociale y ont tout naturellement pris leur place. Julie Lange témoigne: « Nous avons la chance de travailler dans un lieu qui regroupe autant des services administratifs que des activités sociales et culturelles : cours de promotion sociale, club d’échecs, expos, bar à salade,… L’Escale se situe sur un lieu de passage privilégié pour les habitants et cela leur permet d’être en contact avec les activités proposées par les associations. »

Le comité de Fontin : des activités à destination des jeunes

John Rossenfosse est président du comité de Fontin. Il est bénévole dans l’association depuis 10 ans. La concertation des comités de quartier fonctionne bien : « C’est nouveau et c’est génial. On voit plusieurs comités à la fois, ça donne des idées à tout le monde. Dès qu’un comité a besoin d’un coup de main, on est là pour s’entraider. Il n’y a pas longtemps, on a décidé d’investir dans du matériel. On a acheté deux chapiteaux qu’on loue pour des événements extérieurs, mais quand c’est un autre comité qui en a besoin, on le prête. » Le comité de Fontin est un des plus actifs sur la commune d’Esneux. Il organise des activités auxquelles les jeunes sont invités à participer: « Chaque année, il y a un grand feu [avec les sapins de fin d’année, ndlr], une soirée d’Halloween, un barbecue, et une soirée Télévie depuis deux ans. Au début, c’était pas évident, les jeunes venaient surtout pour boire un verre sans participer. Aujourd’hui, après toutes ces années, c’est différent : ils nous aident à monter les chapiteaux, les bancs,… ils s’occupent un peu de tout ». De nouvelles activités leur sont également proposées : « On a organisé un tournoi de pétanques des animations,… on propose plus d’activités et c’est peut-être aussi ce qui a suscité l’intérêt des jeunes. » Occuper les jeunes, les empêcher de s’isoler, voilà ce qui motive avant tout John Rossenfosse, lui-même père de famille : « Chez moi, la porte est toujours ouverte, ils savent qu’ils peuvent venir se confier et viennent d’eux-mêmes spontanément. Lorsqu’on organise un événement, tous les jeunes participent, il n’y en n’a pas un qui manque. »

Le projet « D’une rive à l’autre », qui concerne en priorité le Comité de l’Espérance, reçoit le soutien des autres comités de quartier, comme à Fontin : « C’est un beau projet, parce que les gens du camping ont mauvaise réputation alors que cela n’a pas lieu d’être. Il faut que les autres habitants de la commune, qui ont la chance de vivre dans une maison, se rendent compte que les habitants du camping sont des gens comme tout le monde. »

Bon nombre de citadins ont tendance à croire qu’on s’ennuie dans les campagnes, et que les grandes villes détiennent le monopole du socioculturel. Le foisonnement d’activités et l’implication des habitants des divers comités de quartier d’Esneux nous prouvent le contraire. « Passer le pont », c’est aussi prendre conscience qu’il se passe des choses ailleurs, et que ça vaut la peine de savoir regarder un peu plus loin.

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