C4 : Quelles sont les positions des différents partis francophones par rapport au secteur associatif et quels sont les liens qui les unissent?
G.M. : « Chaque parti a son propre rapport à la sphère associative, même si les différences qui les opposent sont souvent fort minces. Le CDH, et avant lui le PSC, ont toujours considéré le pilier catholique comme un réservoir de voix. Par exemple, les jeunes partant en vacances avec les mutualités chrétiennes reçoivent un message implicite qui est « votez pour ce parti ». Toutefois, depuis quelques années, le CDH vise également la sphère familiale.
Le PS est quant à lui un peu moins favorable à une grande expansion du secteur associatif. Bien qu’étant complètement pour le développement de syndicats puissants et d’autres réseaux sociaux, le Parti Socialiste préfère que la majorité des compétences reste sous une sphère étatique. Le Mouvement Réformateur est pour sa part opposé à un Etat qui investit énormément dans la sphère culturelle. D’après ses responsables, une trop forte intervention des pouvoirs publics a pour effet d’étouffer le système culturel. Ils préfèrent donc souvent des organismes indépendants, avec des interventions financières ponctuelles de l’Etat ».
C4 : En quoi ces trois partis sont-ils différents d’Ecolo ?
G.M. : « Ces trois partis ont pour caractéristique commune de s’être appuyés sur de nombreux piliers associatifs. Parmi ceux-ci, citons les ASBL dont la direction est souvent contrôlée par les pontes du parti au pouvoir. Ces piliers associatifs ont alimenté la vie politique de manière continue jusqu’à l’apparition du parti Ecolo. Ce parti n’a jamais, à proprement parler, créé de réseau associatif. Il a bien sûr noué de nombreux contacts avec les sphères associatives (en particulier les réseaux associatifs progressistes), mais ne s’en est jamais servi comme d’un pilier. On peut donc parler de non-alignement des écologistes au niveau associatif. Cependant, on ne peut pas dire que le parti Ecolo soit distinct de l’associatif puisqu’il est lui-même issu d’un mouvement social. Il est même parfois considéré comme le parti le plus « associatif » des quatre grands partis ».
C4 : Quel est le rôle de l’associatif d’un point de vue politique ?
G.M. : « Il existe une relation de dépendance entre le vote et l’appartenance à un secteur associatif politisé. Les messages que font passer, par exemple, les ASBL pilotées par les partis, sont clairement marqués par l’idéologie de ceux-ci. L’associatif participe clairement à un processus de socialisation politique des citoyens. En entrant dans une sphère associative, le citoyen prend un engagement à la fois social et politique. Cependant, comme l’expliquent les travaux de Frognier 1, le fait, par exemple, d’appartenir à un syndicat, entraîne beaucoup moins qu’avant le syndiqué à voter pour le parti correspondant. On parle de plus en plus de « volatilité électorale ».
Depuis les années 80, une volonté d’un système plus participatif a eu pour effet d’augmenter considérablement l’associatif. Cela permet également aux pouvoirs publics de limiter les coûts de ses actions. De plus, en déléguant les tâches, ils ne sont plus responsables des échecs éventuels des actions qu’ils subventionnent, tout en pouvant se vanter, en cas de réussite, d’avoir subventionné le projet ».
C4 : Faut-il s’inquiéter d’une telle proximité entre le secteur associatif et le politique ?
G.M. : « Je ne pense pas. Au contraire, c’est tout à fait normal. Souvent, l’associatif sert de première étape dans l’évolution politique d’un citoyen lambda. Grâce à cela, le citoyen trouve une identité, se forge un capital social solide. J’ajouterai que le fait d’être subsidié n’est pas nécessaire pour une ASBL. Bien sûr, cela permet d’augmenter ses moyens d’actions, mais cela ôte aussi pas mal de liberté à l’organisme ».
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nLe volontariat : un statut pour les bénévoles
Lorsque le législateur s’est décidé à écrire une loi pour encadrer le travail « bénévole », il a préféré utiliser le terme de volontariat – qui fait moins « bonnes œuvres » et met d’avantage l’accent sur l’engagement. Depuis le 1er août 2006, la loi sur le volontariat est entrée en vigueur et détermine l’ensemble du cadre légal relatif au travail bénévole. Elle définit ce qu’est un volontaire, qui peut l’être et sous quelles conditions (avec notamment une simplification administrative pour les allocataires sociaux), et quelle est sa responsabilité. Elle impose l’établissement d’une convention (la note d’organisation) qui le lie à l’association et détermine les plafonds d’indemnités forfaitaires que le volontaire ne pourra pas dépasser – sous peine d’être considérées comme une redistribution.
Certains observateurs avisés identifient dans cette loi le début d’une reconnaissance de l’importance du travail bénévole – en accordant enfin un statut aux personnes concernées
– Les associations en Belgique : une analyse quantitative et qualitative du secteur., p. 13, Graphique 1
Notes:
- Professeur à l’Unité de sciences politiques et de relations internationales de l’UCL ↩