Les parlers politiques

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C4 : Quelle est l’identité de votre parti ?

• Didier Reynders : Historiquement, c’est le plus ancien parti européen. Il a été créé en 1846 contre les partis conservateurs de l’Ancien Régime, dans le but de lutter pour l’égalité et les libertés de tous les citoyens. Il s’est battu pour des causes fondamentales telles que l’enseignement obligatoire et gratuit et la sécurité sociale. C’est un parti libéral authentique, car à sa création il s’opposait à des partis catholiques. Tout au long de son existence, il a milité pour des réformes fondamentales touchant à la liberté, à l’égalité et à la solidarité.

• Joëlle Milquet : Elle est exprimée dans son nom : le centre démocrate humaniste. « Centre » parce que nous refusons la logique droite-gauche de l’affrontement entre les intérêts particuliers, mais que nous essayons de défendre l’intérêt général, et parce que nous voulons être au cœur de la société afin de la changer de l’intérieur. « Démocrate » parce que, à l’opposé du populisme et des simplismes, nous croyons que le sens du politique est de permettre de faire naître un projet de société dans lequel chacun peut se reconnaître et parce que nous voulons (ré)imposer le politique (et l’humain) à l’économique et la mondialisation. « Humaniste » parce que nous considérons chaque personne comme la seule priorité de toute politique et qu’un mouvement politique doit aussi exprimer des valeurs.

• Jean-Michel Javaux : C’est un parti jeune, qui s’est d’abord créé autour d’une préoccupation pour l’environnement, et de l’idée d’envisager les choses dans le long terme. C’est également un parti de jeunes, qui souhaitaient une alternative à ce que proposent des partis en place depuis une éternité. La principale nouveauté était de vouloir agir au niveau politique sur l’écologie.
• Elio di Rupo : Le PS s’est créé en 1880 pour lutter contre la classe économique et financière dominante. Le concept de base, c’est d’être un parti aux côtés des travailleurs – ce qui reste vrai actuellement, mais dans un contexte différent. Une autre caractéristique est la globalité de sa stratégie politique : d’une part, on récompense l’effort, on vise l’excellence et la promotion des talents, qui nous tirent vers le haut, et nous pensons que celui qui travaille mérite de gagner plus que celui qui ne travaille pas ; mais parallèlement, nous voulons un système légal de solidarité pour aider tous ceux qui éprouvent des difficultés. Le PS est donc à la fois pour le progrès matériel et économique, et pour la sécurité.

C4 : Quelles évolutions et transformations idéologiques votre parti a-t-il connu ?

• EdR : La Crise a révélé au grand jour que le capitalisme libéral et les dérégularisations du système permettent à une poignée de spéculateurs d’accumuler des fortunes personnelles en utilisant ce système financier. Aujourd’hui, le PS continue donc à rejeter le capitalisme débridé mais intègre l’économie de marché, qui doit être régulée et encadrée.

• JMJ : Depuis dix ans, nous combattons le cliché : “c’est bien de vous occuper des arbres, mais il faut penser aux humains avant !” Aujourd’hui, l’écologie politique n’est plus réservée aux bobos et aux bourgeois qui ont déjà une bonne qualité de vie et du temps pour eux, mais s’adresse à chacun d’entre nous. « Ecologie», vient du grec et signifie « notre jardin ». Et pour nous, c’est « notre jardin » au sens large : la famille, les anciens, le quartier, la province, … C’est donc dans ce jardin – le milieu où l’on vit – qu’Ecolo cherche à créer de nouvelles solidarités et de nouveaux services.

• J.M. : Le CDH est l’héritier du Parti social chrétien né en 1945 et fondé sur le personnalisme communautaire. Cette doctrine rejette tant le capitalisme libéral que la philosophie socialiste de la lutte des classes. Elle veut construire une société où l’humain s’épanouira : défense des libertés démocratiques, promotion de la famille, valorisation de
l’initiative privée, solidarité sociale en constituent les axes principaux. Le changement de nom du parti, en 2002, a été le signe d’un renouveau idéologique qui intègre l’héritage social-chrétien, mais aussi un certain nombre de ruptures décisives dont la plus manifeste est une déconfessionnalisation revendiquée et assumée. Le vrai clivage aujourd’hui n’est pas entre croyants et non croyants, mais entre les personnes qui demeurent attachées à des valeurs universelles et celles pour qui toutes les valeurs sont relatives.

• DR : De plus en plus d’ouverture. Le Parti Libéral est devenu le Mouvement Réformateur, pour montrer une volonté permanente de faire évoluer les choses, et de lutter contre des conceptions conservatrices. Aujourd’hui, il s’est ouvert à toutes les convictions religieuses et philosophiques, mais aussi à une nouvelle préoccupation, celle de l’environnement et du développement durable. C’est donc un parti qui bouge et qui tente de s’adapter au pluralisme de la société mais aussi à la tendance naturelle à une influence plus forte et plus autonome des régions. C’est un parti qui sera toujours amené à évoluer car il est opposé en permanence au conservatisme ambiant.

C4 : Quelles sont les phrases emblématiques de l’identité de votre parti et de vos combats?

• DR : C’est le nom du parti : « réformateur », qui montre que nous ne sommes pas révolutionnaires mais désireux d’aller vers des changements qui tiennent compte de l’évolution de notre société. Nous militons pour la liberté, la responsabilité et la solidarité ; et la liberté individuelle doit primer tant qu’elle ne met pas en péril celle d’autrui.

• JM : Nous préférons la qualité de l’être au mythe de l’avoir. Nous refusons l’élitisme comme le laisser-être et recherchons l’excellence collective. Nous ne pouvons revendiquer nos droits que si nous sommes conscients de nos devoirs. Nous voulons subordonner le développement économique à un développement humain durable. Le développement économique doit être un moyen et non une fin. Nous défendons des valeurs, non des intérêts. Nous acceptons les compromis, mais pas la compromission.

• JMJ : J’aime beaucoup ce slogan : « nous ne vous offrons pas la lune, mais nous vous proposons de se réapproprier la terre ». Mais je pourrais également vous dire logement, accès à l’emploi et surtout meilleure répartition et redistribution des richesses… En fait, les préoccupations d’Ecolo forment le triangle société/économie/environnement.

• EdR : Nous ne sommes ni résignés, ni idéalistes naïfs et nous sommes en perpétuelle résistance contre les injustices. On mène une politique pragmatique pour le progrès humain, qui comprend à la fois la dimension matérielle et économique de l’homme, mais aussi sa dimension affective et sociale.

C4 : Quelles sont les problématiques sociales les plus importantes ?

• EDR : Il y en a plusieurs, mais le but, c’est de permettre aux gens —qu’ils soient âgés, malades, …— de continuer à vivre dans la dignité, et d’avoir une sécurité sociale qui les protège. La sécurité sociale est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas.

• JMJ : Il faut améliorer les logements sociaux, et aussi, au niveau de l’emploi, remotiver, remettre le pied à l’étrier. Il faut comprendre la frustration des chômeurs, nombreux, à qui on répète qu’il y a beaucoup d’emploi disponible… et qui entendent parler des salaires indécents de quelques uns. C’est le rôle de l’Etat d’encourager le développement de l’économie mais aussi de permettre une plus juste redistribution des richesses.

• JM : Il n’y a pas beaucoup de sens à départager les urgences sociales. Nous défendons un projet de société complet et cohérent. Mais dans le contexte actuel 4 défis peuvent être mis en exergue : le défi socio-économique, le défi démographique, le défi environnemental, et enfin le défi du sens. A ces 4 défis s’ajoute malheureusement la contrainte institutionnelle. La crise communautaire n’est
toujours pas résolue. La crise rend plus que jamais nécessaire de s’opposer au repli nationaliste ou communautaire. Nous devons défendre de manière volontariste la solidarité entre les personnes, par-delà les clivages linguistiques. Nous devons également maintenir notre attachement à l’image d’un pays riche de ses diversités culturelles.

• DR : La principale se trouve dans le Tiers-Monde, en Afrique. Si chez nous on parle de pouvoir d’achat, là on parle de survie. Il faut donc travailler à la redistribution: faire en sorte que ceux qui ont les épaules plus larges contribuent à aider les plus pauvres à avoir un niveau de vie décent. La solidarité doit être à la fois dans le rapport Nord-Sud, mais aussi dans nos sociétés, même si nos problèmes de pouvoir d’achat sont des problèmes de sociétés développées…

C4 : Qu’est-ce qu’être un leader politique aujourd’hui?

• DR : Faire passer ses idées dans la réalité.

• JM : Un vrai leader politique doit parvenir à porter un projet de société.

• JMJ : Ne pas considérer son parti comme le nombril du monde.

• EDR : C’est formuler des propositions positives et concrètes, quelles que soient les circonstances.

C4 : Que signifie être politiquement incorrect pour un homme ou une femme politique ?

• EDR : Ce sont des termes que je ne connais pas, je n’y comprends rien du tout, ce sont des couillonades (sic)! Mon comportement a toujours été de dire la vérité dans chaque circonstance, à ma façon, peu m’importe qu’on le juge politiquement correct ou incorrect. La situation est suffisamment difficile pour agir de façon correcte sans se préoccuper de ce que d’autres pourraient penser de concepts qui me dépassent.

• JMJ : C’est avoir un comportement inverse à ses idées, et c’est aussi profiter du pouvoir pour faire du favoritisme. S’il y a une raison pour laquelle je me suis engagé en politique, c’est parce que je ne supportais pas de voir certains passer avant d’autres parce qu’ils ont la carte d’un parti ou connaissent la bonne personne. J’ai choisi la politique pour lutter contre les inégalités, et je pense continuer ainsi toute ma vie.

• JM : Mentir. Que cela soit à ses partenaires politiques ou aux citoyens. Le politique souffre aujourd’hui gravement de la perte de confiance de la société civile. Il faut absolument rétablir celle-ci et cela demande de chaque représentant politique une grande intégrité. La démagogie est une des formes les plus courantes de mensonge actuellement. Lorsqu’un homme politique veut faire croire aux citoyens qu’il va pouvoir tout solutionner en accédant au pouvoir, il est politiquement incorrect.

• DR : C’est essentiellement ne pas tenir sa parole, ne pas agir en adéquation avec ses idées et ses projets. Pour le reste, à chacun son style et sa façon de se présenter.

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