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Ah c’était bien le festival de Dour, c’est que les organisateurs se sont toujours targués d’organiser le festival « alternatif » de la région wallonne. Bien intégré dans la commune; quand on n’aimait pas un groupe, on allait flâner dans le bled rencontrer les autochtones et boire une bière à une terrasse…

Pour celui qui se serait endormi – dans le style hibernatus – le réveil peut être semblable au pauvre bougre qui allume le poste de télé. Le festival de Dour, 20e du nom, la gare fliquée comme en 40, pour pénétrer sur le site, il faut passer un checking digne d’un aéroport nord-américain. Depuis quelques années déjà, les allées préfabriquées sont assemblées de sorte qu’il faut se taper un ou deux kilomètres pour arriver au village (alors qu’il se trouve à deux pas) histoire que l’on consomme sur place à des prix prohibitifs. Vaut donc mieux éviter les drogues trop seventies. «Dour» sous acide en 2008, c’est Sim City qui a viré au cauchemar, c’est des panneaux publicitaires gigantesques, des bagnoles exposées en vitrine entre deux scènes; des call girls déguisées en infirmières qui jettent des gadgets publicitaires en pâture, l’organisateur se présente aux élections et le festival est maintenant sous le contrôle d’une banque et d’une agence d’intérim.

Le sponsoring a pris ses aises et s’est installé confortablement sur les sites des festivals depuis quelques années en offrant des services dont on pourrait se passer histoire d’« être présent de façon originale pour que les jeunes soient plus attentifs [à la marque] » [1]. Le banquier : « Pendant les quatre jours que dure le festival, on va prévoir des prises et des chargeurs dans notre stand pour recharger les GSM des festivaliers gratuitement (…) on va aussi prévoir un sèche-linge pour leur permettre de laver leurs vêtements ». Le porte-parole de cette fameuse banque affirme : « Nous voulons faire de la pub autrement. (…) Par exemple, il y a une réduction pour les clients de notre banque, et un concours pour gagner des places gratuites. Tout cela pour rendre les autres jaloux ! » Bonjour l’ambiance.

Pour le leader de l’intérim en Belgique, la vision du sponsoring est édifiante : « Les intérimaires, les personnes sous contrat temporaire et les étudiants seront mis au travail [par notre société] » En d’autres lieux et temps on appelle ça un pot-de-vin. Nan, « Dour », c’est has been, Hibernatus, change de chaîne, le festival alternatif, maintenant, c’est les « Ardentes », au pays de Tchanchès…

Les « Ardentes », c’est un festival à visage humain. Il y a juste quatre-vingt groupes sur un « site convivial et verdoyant » (sic). Avec seulement quarante mille personnes, c’est le festival « qui se classe d’emblée parmi les événements les plus conviviaux et agréables de Belgique » (sic). Les Ardentes, c’est l’événement typique « troisième voie », avec sa cinquantaine de sponsors privés, publics et son village associatif. Ça va de l’agence d’intérim à la mutuelle en passant par la ville. Mais également une marque de jouets ou la loterie nationale. Même les sponsors sont conviviaux. Une attention toute particulière est donnée à la nourriture et «ses dizaines d’échoppes du Monde ». L’écologie et l’hygiène font également partie de leurs préoccupations. Tu veux avoir ta place gratuite ? Rien de plus simple, viens ramasser les gobelets sur le site entre 6 et 7 heures du matin, t’as ton ticket pour le jour d’après. L’année prochaine, c’est promis, les extas proviendront du commerce équitable.

Quand on va sur le site web du « Werchter Festival», on a l’impression qu’ils ont tout inventé, même le concept de festival. Werchter est probablement le premier festival qui tente de recréer la ville à la campagne avec par exemple l’installation de distributeurs de billets et ses écrans géants diffusant des pubs. Et comme toute usine à pollution qui se respecte, l’écologie et la fameuse empreinte écologique sont prises en considération. Avec ses quelques centaines de milliers de festivaliers balançant
leurs centaines de milliers de gobelets par dessus l’épaule, il fallait faire quelque chose. Loin de se laisser démonter, les organisateurs affirment sur leur web site avoir une empreinte écologique moins importante que la ville de Barcelone. Et pour nous prouver qu’ils travaillent bien leur dossier, ils ont créé un espace sponsoring « spécial écologie », financé entre autres par une marque bio célèbre de produits d’entretien, une multinationale de haute technologie bossant sur des batteries «moins polluantes » et une entreprise de traitement des déchets à qui ils refilent leurs tonnes de crasse.

Si il nous fallait ménager notre ami hibernatus, il nous faudrait le promener du côté du regretté electronica Panoctica [2], preuve si il en fallait, qu’il y a moyen de faire des festivals de qualité avec des artistes de renommé (dans leur secteur, on s’entend) sans être agressé en permanence par un environnement dont les responsables reconnaissent eux-mêmes « que [les jeunes] ne sont pas très attentifs à tous cela ».

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Les bons conseils des labels musicaux

Les maisons de disques se lancent dans le conseil. Leur but : professionnaliser les relations entre artistes et annonceurs et s’assurer des relais de croissance.

Le nouvel album de Madonna embarqué en exclusivité dans le téléphone F400 de Samsung, c’est le dernier partenariat imaginé par la division Warner Music France 360°. Voilà à quoi se résume pour l’instant la majorité des relations entre marques et artistes. Mais elles devraient très vite prendre de nouvelles formes. En effet, confrontés à une chute des ventes d’albums, les labels veulent aujourd’hui aller plus loin. « Licensing », synchronisation, supports numériques, spectacle vivant, sponsoring… ils ont aujourd’hui l’occasion de diversifier leurs revenus. Après le sport et le cinéma, la musique devient donc un univers attractif pour « signer » des personnalités. Le marketing des artistes était même au centre des débats du Midem, en janvier dernier.

Le boom du sponsoring musique.

Selon Sponsorclick, spécialiste du sponsoring marketing, les investissements de parrainage marketing en musique vont progresser de 18 à 20 % en 2008, contre 8 à 9 % pour le sport. Déjà, Coca-Cola a son propre site de musique en ligne, Sony-Ericsson est sponsor de la première tournée d’Anastacia en Europe, McDonald’s est partenaire du groupe Destiny’s Child… Sponsorclick rappelle les résultats d’une étude de Procter & Gamble selon laquelle les jeunes sont bien plus hermétiques à la publicité que leurs aînés – ce qui n’est pas le cas en France. D’où la nécessité de les toucher via ce qui reste l’un de leurs principaux centres d’intérêt : la musique.

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