Contraception

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Le cycle menstruel est l’ensemble des phénomènes physiologiques et hormonaux qui débute le premier des jours des règles et se termine le jour précédant les règles suivantes. D’une durée théorique de 28 jours, il peut varier entre 23 et 35 jours. L’ovule mûrit dans l’un des ovaires et se place dans l’utérus où, suite à l’action d’hormones, la muqueuse se prépare à une grossesse éventuelle. Si l’ovule n’est pas fécondé, la muqueuse est évacuée par le vagin : ce sont les règles. La contraception intervient dans ce cycle afin d’empêcher la fécondation de l’ovule et donc la grossesse. Les méthodes hormonales agissent en bloquant l’ovulation. Le stérilet empêche l’implantation de l’ovule fécondé dans la paroi de l’utérus. Enfin, d’autres méthodes empêchent mécaniquement les spermatozoïdes d’atteindre l’ovule, il s’agit du diaphragme, de la cape cervicale et du préservatif.

Les contraceptifs hormonaux tiennent le haut du pavé. Outre la pilule déjà ancienne, on nous propose aujourd’hui les implants sous cutanés, les patchs, l’anneau vaginal ou l’injection d’hormones. À présent, de plus en plus de stérilets distillent également des hormones anovulatoires.

«Stérilets, préservatifs et moyens hormonaux en tout genre !» scandent dans une même clameur les gynécologues comme sur l’étal d’un marché. Mais si une voix s’élève pour demander où sont passés les diaphragmes et les capes cervicales d’antan, une ritournelle bien huilée surgit. Ces moyens contraceptifs mécaniques sont tombés en désuétude, on les trouve difficilement, ils sont peu fiables et relativement contraignants. Mais encore…?

En Belgique, crème spermicide, diaphragme et capes cervicale ne sont plus commercialisés. Le diaphragme, inventé en 1882, est une rondelle en latex ou silicone en forme de dôme et tendue par un anneau rigide. Il s’introduit au fond du vagin juste devant le col de l’utérus et agit comme une barrière physique à l’entrée des spermatozoïdes. La cape cervicale est un petit «bonnet» en élastomère à placer sur le col de l’utérus qui agit selon le même principe(1). La plupart des gynécologues à Bruxelles ne comprennent pas que l’on veuille utiliser ces méthodes et sont d’ailleurs incapables de prendre les mesures du col afin de conseiller la cape cervicale ou le diaphragme adapté!

Tout à l’hormone : tout va bien?

En creusant les raisons invoquées à charge de ces méthodes, on tombe sur une série d’idées reçues, teintées d’un poil de bonne morale paternaliste.

Plus contraignants? L’idée d’une contrainte plus grande du diaphragme et de la cape par rapport à d’autres contraceptifs est toute relative. N’est-il pas contraignant de penser chaque jour à prendre sa pilule ou de changer chaque semaine de patch ou d’anneau et de ne pas oublier de les reprendre après la pause d’une semaine, ni d’oublier de les acheter? N’est-il pas contraignant de souffrir de migraines, nausées, ballonnements? N’est-il pas contraignant de subir des règles abondantes durant dix jours dues au stérilet? De plus, même si les moyens contraceptifs hormonaux possèdent également des avantages, la liste des effets secondaires n’est pas mince. En lisant la notice de la pilule contraceptive, on agonise avant de l’avoir ingurgitée. En vrac: augmentation du risque de complications veineuses dont thrombose, d’embolie pulmonaire, de certains cancers, d’augmentation de la pilosité, d’hypertension, de prise de poids, de migraines, de nausées, contre-indiquée pour les diabétiques et les fumeuses,…

Le diaphragme et la cape cervicale, sans être parfaits, sont totalement inoffensifs pour le corps humain et maintiennent les cycles menstruels naturels. Leur usage est réversible à tout moment. Ils sont pratiques pour des rapports sporadiques et permettent aussi plusieurs rapports consécutifs sans devoir les changer. Ils ne demandent aucun suivi médical. Ils sont écologiques car réutilisables. Les seules contre-indications sont une malformation ou une opération vaginale, ou une descente d’organes. Quant à leur efficacité,
comme pour les autres moyens contraceptifs, elle est directement liée au bon apprentissage de leur emploi. Correctement utilisés, leur fiabilité est de 97 à 98%.

Liberté de choisir et responsabilité collective

L’objectif ici n’est pas de condamner une méthode au profit d’une autre mais de poser la question de la liberté de choisir pour chaque femme et pour chaque couple. Car comme nous l’avons vu, ni la fiabilité, ni la facilité d’emploi de ces moyens contraceptifs ne sont moindres que pour d’autres, les démarches sont simplement différentes. Or, les spécialistes s’accordent à dire que l’efficacité d’une méthode est fortement corrélée au choix et à l’acceptation de cette méthode par la femme: une pilule qu’on ne tolère pas ou qu’on oublie est moins efficace qu’un diaphragme qu’on utilise bien. Aujourd’hui une série de femmes se repenchent sur l’utilité de ces méthodes pour des raisons écologiques, économiques, de santé, de religion, etc. D’ailleurs en France, ces produits sont à nouveau commercialisés en pharmacie.

Pourquoi en Belgique, se heurte-t-on à un mur d’argumentaire bancal? Plusieurs pistes peuvent être envisagées. Une première raison serait économique, les firmes pharmaceutiques, agissant comme toutes entreprises commerciales, tentent d’augmenter leur profit, et les diaphragmes et capes cervicales ne sont pas très rentables. Réutilisables entre un et trois ans, leur prix est d’environ 40 euros. Pour arriver à leurs fins, les sociétés pharmaceutiques visent à conquérir par tous les moyens la faveur des médecins. Mais si ces derniers sont si enclins à favoriser des méthodes hormonales, ce n’est ni parce qu’ils sont tous stupides ni tous cupides. Ces méthodes s’accordent à une représentation sociale largement diffusée : la maîtrise scientifique parfaite de la vie et des phénomènes naturels. Le corps est l’objet d’un savoir médical qui se désincarne de plus en plus du corps vivant et sensible. On introduit la bonne donnée : dose exacte d’hormones, et on produit un résultat vérifiable : absence de fécondation.

Un des arguments des gynécologues contre le diaphragme et la cape cervicale est que certaines femmes (issues de milieux défavorisés ou ados) ne seraient pas capables de les utiliser correctement. Outre le fait que les contraceptifs hormonaux exigent aussi un certain savoir-faire, il est révoltant que les experts entretiennent une attitude infantilisante. Proposer ces moyens de contraception mécaniques implique la transmission de connaissances, notamment anatomiques. C’est un moyen pour redonner aux femmes une prise sur leur fécondité et leur vie, de repenser le lien à leur corps et leur donner une certaine confiance en elles, bref de les aider dans une démarche responsable et autonome.

L’idée d’un corps machine implique une autre représentation, celle où il suffirait d’enclencher un bouton pour tomber enceinte. Possédant les moyens de contrôler parfaitement sa fécondité, il est admis qu’une femme ne tombe enceinte que si elle le veut. Si cela arrive malgré tout, c’est soit qu’elle est idiote, soit qu’elle le voulait bien. Dans les deux cas, l’idée sous-jacente, elle qu’elle est la seule fautive. C’est ce qu’on pense d’ailleurs aussi quand la grossesse était désirée par la femme mais pas par le patron, les collègues, les amis ou le compagnon : «elle a bien choisi son moment celle-là». Les questions relatives à la relation entre deux êtres et la responsabilité de la contraception dans l’acte sexuel ainsi que le désir de grossesse dans un couple sont évacuées.

Si le diaphragme et la cape cervicale ne sont pas la panacée, ils permettent néanmoins d’ouvrir le débat sur la tendance actuelle du «tout à l’hormone». Outre la question de l’importance d’apprendre à connaître son anatomie intime et le fonctionnement de son cycle menstruel, l’usage de ces contraceptifs permet de s’interroger sur des thématiques telles que la responsabilité du partenaire et de la société dans la contraception et la procréation. Que les experts et les responsables en santé publique aient amorcé la disparition
du diaphragme et de la cape cervicale au profit des méthodes hormonales ou qu’ils aient laissé s’installer cette situation sans intervenir, ils sont responsables du verrouillage du débat sur la problématique de la contraception et de la procréation. Or ces thématiques sont pourtant des vraies questions de choix de société.

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