Transports à outrance

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Les transports sont l’ensemble des moyens utilisés pour l’acheminement des personnes et/ou des marchandises. Quand on regarde une carte, on constate que les concentrations humaines sont toujours à l’intersection de routes, que celles-ci soient terrestres, maritimes ou fluviales. Ces routes sont des infrastructures, et si l’on y ajoute les véhicules qui les parcourent alors vous avez devant vous ce qu’on appelle un système de transport.

Il en existe un certain nombre, du plus rapide (aérien) au plus lent (maritime, marche à pied). Historiquement, leur progression a eu un rôle majeur dans la transformation des civilisations : l’une des explications pour expliquer la longévité de l’Empire romain, par exemple, est la qualité des systèmes de transport que celui-ci avait créé (voies romaines, ports) par rapport à ses voisins. De même, les inventions de la boussole puis de l’astrolabe permirent aux navigateurs de s’aventurer en haute mer et de découvrir l’Amérique, découverte qui permit la prospérité de l’Europe. La Belgique fut grâce à sa position de carrefour la première nation du continent européen à se lancer dans la Révolution industrielle. Pour le commerce, les transports sont indispensables : il n’y a pas de commerce possible sans eux.

La mondialisation est ainsi avant tout un phénomène technique : la baisse incessante des coûts des transports a permis, avec la baisse des barrières douanières, l’émergence de ce qu’on pourrait appeler improprement un marché globalisé. Improprement car ce marché n’est pas, ne sera jamais parfaitement fluide (sauf éventuellement dans le cas des marchandises immatérielles) : on ne peut déplacer instantanément un bien d’un point à un autre, cela prend du temps et de l’argent.

Mais de moins en moins : aujourd’hui, ces coûts sont suffisamment peu élevés pour que ce soit financièrement intéressant de produire un bien très loin de son point de vente. Les grandes entreprises ont ainsi disséminé dans le monde entier leurs unités de production en fonction des coûts locaux, et la majorité de leur fret se compose de produits intermédiaires qu’elles envoient d’une unité de production à l’autre avant de les vendre sur le marché mondial. Les exportations ont ainsi crû globalement de 170% entre 1970 et 1997 (1), avec les conséquences que l’on connaît : délocalisation d’usines, effondrement des industries lourdes de Wallonie à cause de la concurrence internationale, apparition d’un chômage de masse durable, mais aussi profusion de biens et services à bas coûts pour les consommateurs belges et européens (vêtements, produits électro-ménagers, articles de téléphonie et d’informatique, etc.). De temps en temps, une petite marée noire nous rappelle que tout cela n’est pas sans influence sur l’environnement, et l’environnement, c’est nous.

La croissance des transports à l’horizon 2050 est estimée, selon les scénarios, entre 100 et 350%, avec une progression moins forte des déplacements locaux et longue distance mais plus forte sur les déplacements à moyenne distance (entre 50 et 1000 km) (2). Les différents scénarios considérés prennent en compte la raréfaction des énergies fossiles, le déclin ou non de l’Europe et sont de toute façon à prendre avec la plus extrême précaution; les chiffres qu’ils annoncent correspondent à une poursuite modérée de la croissance, sans chamboulement majeur de nos habitudes de vie et de consommation. Une première bonne nouvelle selon nos amis prévisionnistes: il n’y aura pas beaucoup plus de voitures particulières en circulation, le nombre de voitures par Belge en âge de conduire étant déjà très élevé (voir note 3). Par contre il y aura encore plus de camions. Pour remédier à l’encombrement des routes, on pourra en construire de nouvelles mais, apparemment, le plus efficace sera encore de ne plus laisser les gens conduire eux-mêmes : bientôt, votre chère progéniture à quatre roues sera guidée automatiquement sans que vous ayez quoi que ce soit à faire. Des tests concluants ont
déjà été menés sur autoroute aux USA : ça optimise l’utilisation des infrastructures et c’est moins dangereux pour vous et pour les autres. Le cycliste que je suis savoure cette petite victoire sur les héros du volant, réduits à l’état de bétail inoffensif par l’évolution technologique de leurs chères prothèses motorisées. Passons. Car, hélas, à ce moment-là je devrai sans doute porter un masque à gaz vu le niveau de pollution engendré par cet accroissement du trafic. Pollution sonore, visuelle, chimique, probablement bientôt électromagnétique… Les transports sont le facteur qui progresse le plus vite parmi toutes les formes de pollution. Et c’est comme on l’a vu une question de vie ou de mort pour le commerce (4) : sans transport, le fatidique signe « = » de cette bizarre équation commerciale capable de mettre sur un même niveau des populations entières et un puits de pétrole n’existe plus. La question commerciale serait donc, in fine, une question technique, et donc quelque chose de l’ordre de la maîtrise. Cela vaudrait peut-être la peine de se demander exactement qui maîtrise qui. Je peux survivre sans mon portable, quoique à Paris ça devient difficile. Mais le jour où mon masque à gaz tombera en panne…

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